Jupiter, initiation au traitement des images

Le traitement des images est un processus essentiel pour l’étude scientifique des sources observées.

D’un point de vue amateur, le traitement des images permet d’améliorer considérablement le rendu des images ou photographies. En d’autres termes, pour rendre une image jolie, il faut la traiter !

Pour les images astronomiques, c’est d’autant plus vrai.
En effet, les sources étant faibles (oublions la Lune, le Soleil, et les planètes brillantes), des temps de poses longs sont nécessaires pour accumuler les photons.
Cependant, les instruments ne sont pas parfaits.
Le télescope vibre, l’atmosphère engendre des aberrations et des déplacements des objets, etc.. Bref, ça bouge sur la caméra ! Ce qui rend les images floues.

Pour pallier ces longs temps de pose donnant des images floues, l’astuce consiste à prendre beaucoup d’images à court temps de pose.
Les perturbations étant relativement lentes, on peut les "figer" sur des temps courts.

Effet de l’atmosphère sur une étoile. Crédit : Fenêtre Sur l’Univers (formation de l’Observatoire de Paris.)

Ainsi, les images sont nettes... Mais peu intenses. Cependant, en additionnant les images, on additionne aussi le nombre de photons reçus et donc l’image est bien exposée et nette.

Parfait me direz-vous ?

Et bien non ! Les images individuelles sont nettes effectivement, mais entre chaque image, le télescope continue de vibrer, l’atmosphère de changer. Donc l’addition brutale des images est encore une image floue.

Exemple en image :

Image brute.
Somme brutale des images.

Il faut donc décaler les images entre elles pour que les étoiles, la planète etc., sur chaque image courte pose soient alignées.

Somme des images recentrées.

On remarque qu’après recentrage, les satellites deviennent plus brillants et beaucoup plus "ponctuels". Le contraste entre Jupiter et satellites est aussi moins important, laissant "apparaître" les satellites.

Par rapport à l’image brute (RAW), l’image centrée et additionnée est de meilleure qualité. En effet, si on zoome sur l’image brute, on voit apparaître des "grains" qui sont dus au bruit de la caméra et au faible nombre de photons reçus sur les images courtes poses. Cet effet granuleux disparaît sur l’image résultant de la sommation des images.

Nous avons à ce stade une image dite "traitée".

Pour Jupiter qui est une source brillante, certains effets du détecteur n’ont pas été pris en compte et seront décrits dans un futur article (Je pense la nébuleuse d’Orion). Mais le traitement décrit ci-dessus est celui utilisé pour les données scientifiques.

D’un point de vue amateur. On peut encore améliorer la "beauté" de l’image.

En effet, à cause de l’atmosphère, même sur les images courtes poses, des déformations apparaissent : une élongation de la planète, un flou léger, etc..

Les détails fins sont alors noyés dans ces déformations.

Comment faire apparaître ces détails ?

Les détails, même s’ils sont invisibles, sont néanmoins présents dans l’image.

La méthode que j’ai utilisée pour l’image de Jupiter est la décomposition en ondelettes (wavelet en anglais).

Cette méthode consiste à décomposer l’image en une somme de détails fins, de détails moyens, de détails étendus. Par exemple, le disque de Jupiter est un détail de grande échelle alors que les satellites sont des détails fins.

Voici en image la décomposition de Jupiter en ondelettes.

Image des détails fins par ondelettes.
Idem pour des détails moins fins.
Idem.
Image pour une grande échelle en ondelettes.

Pourquoi l’appellation d’"ondelettes" ?

Imaginez une goutte d’eau tombant dans un lac : elle produit une onde. Cette goutte produit des ondes qui se propagent circulairement. Et bien Jupiter représente une énorme goutte qui tombe alors que les satellites représentent chacun une petite goutte tombant dans l’eau.
Lors de la décomposition de l’image, on décompose l’image sur des formes similaires d’ondelettes (de plus ou moins grande échelle)

Au final, en jouant sur l’importance relative des détails fins et des grandes échelles, on peut mettre en évidence les détails noyés en les accentuant. Les satellites ne sont évidemment pas les seuls détails fins. Les tourbillons sur les nuages que j’ai fais ressortir en sont aussi.

Image en rehaussant les détails fins grâce aux ondelettes.

C’est presque fini !

Comme vous le voyez, il persiste des "couronnes noires" autours des objets brillants, qui sont dues aux ondelettes.

Pour l’image finale, j’ai appliqué un masque qui sélectionne Jupiter et les 3 satellites. Ce qui est autour de ces objets (le ciel par exemple) est affiché en noir.

Voilà le résultat !

Image finale... OUF !